Elle a profité de la vulnérabilité d'anciens adeptes pour leur soutirer de fortes sommes. L'Eglise de scientologie parisienne a vu son amende de 600 000 euros pour escroquerie confirmée en appel jeudi 2 février. Ses opposants espèrent désormais d'autres décisions "qui pourraient entraîner une interdiction, voire une dissolution" de la Scientologie.
• Qui était visé par le procès ?
La cour d'appel de Paris a condamné les deux principales structures françaises de l'Eglise de scientologie, le Celebrity Centre et sa librairie SEL. Elles vont devoir verser respectivement 400 000 et 200 000 euros pour "escroquerie en bande organisée". Cinq scientologues ont en outre été condamnés à des peines allant de 10 000 euros d'amende à deux ans de prison avec sursis et 30 000 euros d'amende pour le principal responsable français, Alain Rosenberg.
Après un procès en première instance en 2009, celui en appel s'était ouvert le 3 novembre. Dès le début, la défense avait cherché à obtenir un renvoi des débats en soulevant de multiples points de procédure. Les prévenus et leurs avocats avaient claqué la porte deux semaines plus tard, dénonçant un procès "faussé et inéquitable". L'avocat général Hugues Woirhaye avait vu dans cette attitude "une stratégie d'esquive","un choix délibéré de se maintenir dans une posture de déni systématique".
• Secte ou religion ?
Considéré comme une religion aux Etats-Unis et dans quelques pays européens, le mouvement fondé en 1954 par l'écrivain américain de science-fiction Ron Hubbard a été classé, en France, parmi les sectes dans un rapport parlementaire de 1995. Il revendique 12 millions d'adeptes dans 150 pays, dont 45 000 dans l'Hexagone. Il présente comme une aide et une "liturgie" ce que la justice qualifie de méthodes d'escroquerie : tests de recrutement, cures de "purification" avec saunas ou cures de vitamines, joggings intensifs et utilisation de "l'électromètre", appareil emblématique de l'organisation.
Au cours du procès en appel, la présidente de l'Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (Unadfi), Catherine Picard, a décrit à la barre "l'endettement très fort, la rupture des liens familiaux" et plus généralement "l'état de sujétion" pouvant résulter des "méthodes sectaires" employées par la Scientologie parisienne pour endoctriner des "personnes vulnérables".
• Quel avenir pour la Scientologie française ?
"C'est une décision historique", a réagi mercredi Me Olivier Morice, avocat de l'Unadfi. Soulignant que cette condamnation représente une "première" en France, il a estimé que "nous sommes au début d'autres décisions marquantes contre la Scientologie, qui pourraient entraîner une interdiction, voire une dissolution". Jusqu'ici, seules des personnes physiques, responsables du mouvement, avaient été condamnées en France dans d'autres affaires.
En 2009, le parquet de Paris avait déjà profité de ce procès contre la Scientologie, jugée en tant que personne morale, pour requérir la dissolution de la secte. Mais cette demande avait été rejetée par le tribunal. Motif : quelques semaines plus tôt, une modification de loi passée totalement inaperçue avait rendu impossible, rappelleL'Express.fr, la dissolution d'une personne morale pour "escroquerie". Considérant ces réquisitions du parquet comme "illégales", l'Eglise de Scientologie a d'ailleurs assigné l'Etat pour faute lourde en juin. Une procédure toujours en cours.