Le bilan du naufrage du Concordia s'est alourdi samedi avec la découverte, 8 jours après la catastrophe, du corps d'une femme dans l'épave du navire de croisière, où a aussi été repêché un disque dur pouvant donner des informations sur l'endroit où se trouvait le capitaine et ses réactions au moment de l'accident.
Les garde-côtes ont trouvé le cadavre sur un pont arrière dans la partie immergée du navire, selon un responsable des carabiniers qui a précisé qu'il "faudra des tests d'ADN pour l'identifier parce qu'il est méconnaissable après une semaine passée dans l'eau".
Pour le moment, 8 des 12 victimes du naufrage ont été identifiées formellement: six touristes --quatre Français, un Italien et un Espagnol-- ainsi qu'un serveur péruvien et un violoniste hongrois. Par ailleurs, 20 personnes sont portées disparues dont une dizaine d'Allemands, un jeune couple de Français et un autre de retraités américains.
Les recherches devaient continuer de nouveau toute la nuit au moins dans la partie émergée du navire. Des plongeurs ont récupéré samedi un disque dur contenant des images de caméras de sécurité, très utiles car situées sur la passerelle de commandement, selon les médias.
La compagnie Costa Crociere qui possède le Concordia accuse le commandant Francesco Schettino d'avoir averti trop tardivement les secours, des affirmations contestées par le capitaine, assigné à résidence depuis mardi dernier et mis en cause pour homicides multiples par imprudence, naufrage et abandon de navire.
Suspendu de ses fonctions par Costa et privé de sa tutelle légale (il doit se payer son avocat), M. Schettino a reconnu avoir fait une erreur en passant trop près des côtes de l'île, mais il dit en avoir informé rapidement Costa et nie avoir abandonné le Concordia au beau milieu des secours, affirmant être tombé dans une chaloupe.
La découverte du disque dur, venant s'ajouter à des enregistrements des conversations téléphoniques du capitaine, a eu lieu alors que le chef de la protection civile italienne, Franco Gabrielli, nommé vendredi commissaire spécial pour superviser toutes les opérations liées à la catastrophe, se trouvait sur l'île du Giglio.
M. Gabrielli a garanti que les autorités n'ont "fixé aucune limite de temps aux recherches" des disparus, expliquant que les sauveteurs élaborent une sorte de carte du navire pour contrôler les endroits où ces personnes se trouvaient quand l'immense navire de 17 ponts a commencé à prendre l'eau et chaviré.
Les pères de Mylène Litzler, 23 ans, et de Michaël Blémand, 25 ans, un couple français, ont lancé samedi depuis l'île du Giglio un appel à témoins dramatique en direction des 4.200 occupants du Concordia pour qu'ils fournissent "le moindre détail" sur leur position pendant l'évacuation.
L'exploration en profondeur du navire, qui a repris samedi après avoir été interrompue vendredi en raison d'oscillations du Concordia, est "un travail incroyablement complexe", selon M. Gabrielli. La progression des plongeurs est ralentie par des portes bloquées, des monceaux de meubles et des lambeaux de moquette.
Les plongeurs "accomplissent un travail héroïque", selon le curé du Giglio, Lorenzo Pasquotti, qui a remercié les pompiers de lui avoir apporté la statue de la Vierge de la chapelle du navire.
Les chances de trouver des rescapés encore en vie sont désormais "réduites au minimum", a reconnu à l'AFP Cosimo Nicastro, porte-parole des garde-côtes, évoquant un "miracle" compte tenu de "la température très basse de l'eau".
Susy, la maman de Dayana, une fillette italienne de 5 ans qui a disparu avec son père la nuit du naufrage, a imploré les secours: "Continuez de chercher Dayana".
Le préfet Gabrielli a demandé à entendre des experts médicaux pour comprendre s'il serait possible de survivre plus de 8 jours au fond de l'eau.
Parallèlement, sur le méga-ponton flottant de la société néerlandaise Smit Salvage, les préparatifs s'accéléraient pour le pompage des 2.380 tonnes de mazout que le Concordia renferme encore dans ses réservoirs et qui pourraient provoquer une marée noire.
Le préfet Gabrielli a souligné qu'"il y a déjà eu pollution, car le navire transportait de l'huile, des solvants, des détergents, tout ce qui sert à une +ville+ de 4.000 habitants". Des analyses sont en cours pour voir s'il est possible de combiner la recherche des disparus et le début du pompage.
Le paquebot est couché tel une baleine agonisante à une trentaine de mètres du rivage du Giglio, pittoresque île rocheuse de l'archipel toscan qui est aussi une réserve naturelle dont les eaux sont peuplées de thons, murènes, langoustes, rorquals ou dauphins.
Des bouées antipollution ont été disposées autour du navire pour protéger les côtes au cas où une partie des hydrocarbures s'échapperait en mer pendant la vidange des cuves, qui prendra au minimum deux ou trois semaines.
L'organisation italienne de consommateurs Codacons a annoncé le dépôt "mardi ou mercredi" d'une plainte en nom collectif d'une centaine de personnes "de toutes les nationalités" à Miami, siège de Carnival, contre ce groupe qui est la maison-mère de Costa, propriétaire du Concordia.
Le Concordia, qui effectuait une croisière en Méditerranée, s'est échoué dans la nuit de vendredi à samedi dernier après avoir percuté un rocher devant l'île du Giglio. Il était parti deux heures et demie plus tôt de Civitavecchia, avec 4.229 personnes à son bord dont 3.200 touristes de 60 nationalités et un millier de membres d'équipage de 40 pays différents.